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Ayayay

Le sol s’est dérobé au rebond de mes fesses 
chacha de chairs  
aveuglé de paillettes 

Lanvil saoul chancelle devant nous.

Montées au tambour 
mon sang soukougne dans la mélasse masse monde 

Hors des mains immondices
peaux tendues aux caresses du vent
nous volons les sucs de Soleil.

Et le péyi révé crie
ayayay éia Erzulie

quand le pays réel 
zanzolant perdu éperdument 
vomit les secousses des matrices évadées.

Lanvil koré 
tremble 
Je tremble en transe avec lui.

Ne soyons pas hypocrites. Dans sa version contemporaine, le carnaval martiniquais a toujours intégré des personnages obscènes. Cela n’avait pas d’importance parce que c’étaient des hommes. La “nudité” au carnaval est devenue un problème de société lorsqu’elle a concerné des femmes. 

Le corps des hommes dénudé a certes toujours choqué les bons esprits, mais ne méritait pas qu’on installe autour de lui de débats médiatiques ou intellectuels réprobateurs.

Cette inégalité est tout à fait similaire le reste de l’année : les boxers visibles des garçons dans les lycées sont un problème, mais ils sont tolérés. Par contre, lors de l’affaire du crop top, tolérer les nombrils des filles a mobilisé le plus haut sommet de l’Etat. Lorsque j’ai étudié la question des uniformes au cours des mes recherches, je me suis rendue compte qu’ils ont souvent été institués afin de s’assurer que les corps des adolescentes soient contrôlés. Dans un lycée dont je tairai le nom, ce sont les garçons qui ont réclamé l’uniforme au prétexte que les décolletés des filles les déconcentreraient. 

Le carnaval n’est que le théâtre d’un enjeu plus global dans une société patriarcale : le contrôle du corps des femmes. Ces corps sont obscènes par définition lorsqu’ils évoluent dans l’espace public, parce qu’ils n’ont toujours pas acquis la pleine citoyenneté et sont toujours envisagés comme des objets sexuels à la disposition privée des hommes. Ils n’ont toujours pas droit de cité autrement qu’aux mains des hommes. Ils doivent encore et toujours disputer leur légitimité à ester dans l’espace public et républicain au même titre que ceux des hommes.

L’habit correct est l’habit de l’homme, et même dans l’habit de l’homme on peut vous reprocher un manque de féminité. Donc il n’existe pas de tenue correcte pour une femme : la femme est en elle même l’objet interdit. Elle doit toujours discuter, négocier, justifier, défendre son existence, quelle que soit la tenue portée.  

Les corps des hommes n’ont rien à démontrer, rien à justifier, rien à déclarer, parce qu’ils sont le corps de la nation, souverain et digne par définition.  

Au carnaval martiniquais, certaines femmes choisissent de porter des costumes très légers, voire de parader seins (presque) nus, avec comme objectif d’installer dans l’espace public un corps de femmes que le patriarcat, par divers moyens, s’échine à disqualifier et à détruire. Peu de femmes incarnent un tel discours politique de façon explicite. Mais les femmes qui portent des costumes très sexy ignorent rarement la portée politique d’un tel choix. 

Il en va de même pour les autres costumes du carnaval. Il n’est pas dit que les centaines de personnes en tenue de neg gwo siwo en portent pleinement la charge politique et rituel. Leur disputera-t-on le droit de parader couverts de mélasse? Pourquoi croire que ceux-là auraient plus d’agentivité politique que celles-là ? A-t-on demandé aux femmes en tenues sexy leur avis sur la portée politique de leur vêtement avant de dire qu’il n’en avait aucun? 

On a accordé depuis des décennies de la légitimité, un rôle et du sens à des costumes masculins tout aussi voire beaucoup plus dénudés qu’un bikini, sans que cela ne provoque d’inquiétudes sur la santé de notre société martiniquaise. Prenons pour exemples le “bébé”, le “malpwop” et le “makoumè”, tous incarnés par des hommes depuis les années 1970.

Le bébé est un adulte qui parade dans les rues uniquement vêtu d’une couche. Un bébé avec un soutien gorge ne serait plus un personnage crédible, et on ne peut pas laisser ( bon sang!) une fille marcher dans la rue les seins nus. Donc les bébés ne sont, essentiellement, que des hommes presque nus, entrés au patrimoine. 

Le Malpwop est parfois une variation du bébé. C’est généralement un homme qui trimballe un pot de chambre contenant une mixture douteuse. L’humour scatologique s’accompagne souvent chez lui d’une obscénité sexuelle, verbale ou physique. On pourrait débattre des heures du sens de ces représentations infantilisantes des hommes noirs, dans un contexte matrifocal réel ou fantasmé… c’est du sérieux !  

Le Makoumè, dont j’ai eu l’occasion de parler dans des productions scientifiques, mime les hommes travestis en femmes, (qu’on distingue en les appelant manawa) en portant des tenues et des artifices féminins de façon volontairement maladroite (rouge à lèvre débordant, pilosité débordante, corps débordant de vêtement mal ajustés superposés sans la moindre visée esthétique…). Reflet de l’homophobie courante, les makoumè sont aussi souvent obscènes, en string, en dentelle, en transparence, et sont à ce point reconnus qu’ils accompagnent Vaval avec les Pleureuses dans ses derniers instants à Foyal sous la gouverne de l’excellent monseigneur Jean-Emmanuel Emile. 

A leurs côtés donc, les personnages strictement féminins auxquels on a donné des noms sont bien couverts, respectables, et ne semblent pas concernés par le rite d’inversion. Aux femmes, le folklore. Aux hommes la transgression. On voit à peine le visage de Marian lapofig. Karolin zié loli est couverte de tissus et a ce rôle (particulièrement attractif?) de porter sur son dos un encombrant mari ivre. Les reines du Carnaval revêtent comme les Guiablès des tenues traditionnelles de la fin du 19e siècle ou des costumes complexes, parfois roulants. 

On crie au scandale si s’invitent dans notre Carnaval des costumes de samba string et compagnie, parce que ça vient du Brésil. Mais les touloulou de Guyane, ça passe : malgré leur réputation sulfureuse, elles sont quand même décentes. On ne voit tout simplement pas leur corps. 

Les nèg gwo siwo mettent tout le monde d’accord. Mais lorsqu’une femme investit ce personnage sacré du carnaval sein nus, dans une grande cohérence historique à mon sens, il faut tout de même qu’elle fasse un communiqué sur les réseaux sociaux pour justifier son geste. 

Quant à la chanson, tant que ça tournait juste autour du lolo, du coco, du kal (85% de l’homélie de Vaval cette année tout de même … oui oui, j’ai calculé), ça allait. Tant qu’il s’agit de visualiser un phallus pénétrant une femme, et plus précisemment ta mère, ça va. Mais “le clito, le clito”, “trouver ta prostate”, trop c’est trop. L’agentivité sexuelle des femmes, qu’elle soit corporelle, verbale, visuelle ou fantasmée… ça ne va pas, ça ne va jamais. 

Donc.

Le patriarcat se pose instamment la question. Nous nous la posons toutes et tous parce que nous sommes formés par ce patriarcat à prendre cette question au sérieux : 

Il y a-t-il, en vérité, trop de fesses de femmes et de seins de femmes visibles au carnaval martiniquais ?

Étant une adepte du brennen bonda, étant aussi une de ces femmes qui après un tour de piste en PoumPoum short ont certainement la moitié des fesses à l’air, peut-être que mon avis sur le sujet “femmes obscènes” est biaisé… 

J’ai donc décidé, pour travailler sur le sujet, de commencer par une étude froide et quantitative, et de le faire avec des camarades moins vakabón que moi. Certaines trouvaient même qu’il y a beaucoup – trop – de femmes en string au carnaval. Et on est allé compter. Compter les strings, les seins nus, les PoumPoum, les travestis, les tradi, etc…

Vous nous avez peut être aperçues à l’entrée Sainte Thérèse, les dimanche et mardi gras de carnaval. Nous avons compté 2600 carnavaliers et carnavalières sur ces deux jours. Voici le résultat terriblement obscène de nos comptes : 

3% des personnes, au carnaval, portent des strings et/ou des cache-tétons. 

3000 personnes sur 100 000. Moins d’un 1% de notre population.

Je sais. 

Même moi, je pensais qu’il y en avait beaucoup plus. 

Pourquoi en voit-on davantage une fois qu’on marche dans les rues de Fort de France ? plusieurs hypothèses ont été explorées sur le terrain : 

La première, c’est que nous sommes conditionnés à les voir par le débat médiatique dès l’Epiphanie. À chaque vidé, le cadrage (essentiellement fait par des hommes) sur les fesses nous encourage à voir des fesses. Les débats sur les fesses nous préparent à voir des fesses. Une fois sur place, nous avons déjà vu sur les écrans et les journaux plus de fesses que celles que mathématiquement nous croiserons au carnaval. 

La deuxième raison, liée à la première, c’est que notre propre regard est conditionné. Chaque femme en string qui passe dans notre champ de vision attire notre regard et alimente notre biais de confirmation. Elle renforce en nous le confort de notre certitude. Que l’on soit ou pas choqué par la vue de fesses de femmes ou d’hommes, nous pouvons passer d’un focus sur un string à un autre sans nous rendre compte qu’entre les deux fesses que nous avons regardées, il y avait bien cent personnes qui ne portaient pas de string. 

La troisième raison, c’est que beaucoup de femmes entrent dans le carnaval avec une tenue que nous avons appelée ( faute de mieux ) PoumPoum, en référence au “PoumPoum short” affectionné pour sa sportivité, son confort, son esthétique. Il couvre généralement les fesses et le haut des cuisses. Toute sportive sait qu’on doit régulièrement ajuster ce type de short sur ses fesses lorsque l’on court : il remonte, et au bout d’un moment, laisse apparaître le bas des fesses.  Il faudrait, pour éviter que l’on voit nos fesses dans le vidé, lorsqu’on a des fesses charnues, que l’on coure avec un cycliste. Et même dans ce cas, le cycliste rentre parfois entre les fesses. Seule solution donc : interdire les fesses.

J’espère que nos dignes lecteurs et lectrices auront survécu à une telle analyse des fessiers féminins. Il se peut qu’après avoir lu autant de fois le mot “fesses” vous en voyiez partout demain matin… 

Les personnes qui critiquent les vêtements des femmes dans les media partent le plus souvent du principe qu’elles les choisissent parce qu’ils sont sexy. C’est un argument recevable, mais celui du confort l’est tout autant. Et les préparatifs du carnaval, entre femmes qui portent ce genre de vêtements l’illustrent très rapidement. Il suffit donc de demander aux principales concernées – ce que j’ai fait. Cela suppose, bien entendu, d’envisager qu’elles aient un minimum de jugeote. 

Le costume “Poumpoum” qui, souvent, aboutit à mouler voir dévoiler le bas des fesses des femmes au carnaval, est porté par 25% du public, et représente 44% des costumes. Il mérite donc bien plus d’attention que le string ou les cache-tétons, que portent une part négligeable de la population de façon assez désorganisée. Le PoumPoum short est quant à lui un costume très codifié, malgré sa simplicité apparente. C’est d’ailleurs sa longévité et sa praticité qui donnent l’illusion de sa banalité. 

Le costume dit “PoumPoum” est composé de bas en haut comme suit depuis plus de 30 ans : 

  • des baskets 
  • un collant, de préférence résille 
  • un short 
  • un “maillot” : bikini, brassière, body, bandeau selon les morphologies 
  • un maquillage coloré 
  • des paillettes

Des accessoires féminins peuvent être ajoutés. 

L’observation des 2600 carnavaliers et carnavalières sujets de l’étude montre que le costume a une exclusivité : il est rare que les personnes qui portent au moins des collants et un maillot ne portent pas par ailleurs les autres éléments. 

Les longs préparatifs des femmes montrent l’attention portée au résultat et une certaine inquiétude concernant les tissus, qui doivent répondre à des injonctions contradictoires, personnelles, culturelles, sociales et politiques. Le choix de chaque élément est donc un choix très réfléchi, facilité avec l’âge par l’expérience. Mais les changements du corps, au cours de la vie, peuvent amener à recommencer le travail de recherche et à réinvestir, ce qui suppose de repasser par toutes ces injonctions. 

Il y a, derrière le choix d’un PoumPoum short, une charge mentale importante. Quand un artiste parvient à faire croire que quelque chose qui lui a demandé beaucoup de travail est simple, on appelle ça du talent. J’oserais dire que les PoumPoum martiniquaises ont collectivement et individuellement beaucoup de talent.

Les travestis, costumes plus élaborés, se distinguent du PoumPoum, par la complexité des tenues et très souvent l’absence du PoumPoum short. À la place, on trouve parfois des strings ( oui oui, respirez). La moitié des femmes aux fessiers apparents portaient un costume complexe, souvent en groupe, et ont donc fortement investi dans la qualité esthétique de notre carnaval. Les autres femmes travesties portent des body, maillots de bain, de longues jupes ou des leggings colorés. 

Il n’y a pas de séparation drastique entre ces catégories : il est très courant que les carnavalières en PoumPoum consacrent une grande énergie et un certain budget à confectionner au moins un costume travesti complexe par saison, souvent par groupes de 3 à 6 femmes, soit pour un des vidés soit pour une soirée de carnaval. Cela leur demande énormément de temps (voire d’argent), ce qui explique en partie la nécessité pour le reste du programme d’adopter un costume efficace et normalisé. Penser l’expérience de ces femmes sur l’ensemble du carnaval et pas seulement sur la vision ponctuelle de leur corps est fondamental pour comprendre la culture qu’elle déploient, car il s’agit bien de culture : les femmes sujettes aux critiques sont mathématiquement les moteurs de la machine carnavalesque martiniquaise. Ce sont les plus nombreuses, elles représentent avec les groupes à pied l’essentiel de l’énergie qui produit le carnaval martiniquais. Les effacer de Lanvil, c’est effacer le carnaval.

Si 100 000 personnes déguisées ou pas ont participé chaque jour au carnaval de Fort de France, cela veut dire que 25 000 d’entre elles étaient des femmes PoumPoum. 4000 hommes adoptent aussi ce costume créé par les femmes (ils ne doivent pas être confondus avec les makoumé).

Ces 25 000 femmes par jour portant des PoumPoum shorts appartiennent généralement à la tranche d’âge 15-45 ans dont on espère qu’elle voudra bien rester en Martinique, peupler le pays, faire des enfants, payer nos retraites. On les aime, mais on les aime maman doudou bien habillées, et on crache sur elles dans un PoumPoum short quand elles ont tellement couru, crié, animé et décoré notre carnaval que leur short est un peu remonté…

25 000 femmes en PoumPoum short font-elles des choix vestimentaires uniquement pour choquer les gens ? N’apportent-elles au carnaval martiniquais que déshonneur, obscénité et désordre ? 

Le costume porté par ces 25 000 femmes chaque jour est le costume principal du carnaval martiniquais contemporain. Les costumes traditionnels gardent une place importante dans les défilés, mais ne sont pas adaptés pour courir le vidé. Je mets au défi quiconque de faire deux tours de Lanvil derrière Guanaval en Karolin zié loli. 

Et c’est bien le vidé qui fait la particularité de notre rituel, de ce moment de transe que nous envient les autres Caribéen·nes. C’est bien le vidé qui porte le carnaval de Foyal, qui lui donne sa puissance, son rythme, ses sons et ses couleurs. C’est bien le vidé qui vide le pays de ses douleurs, de ses impossibles conflits, de ses cris déchirants, des souffrances irréparées de ses corps. 

Demandez à ces femmes ce qu’elles ressentent quand elles winent toutes ensemble. Demandez-leur quel bénéfice cela représente de pouvoir danser gratuitement dans la rue sans que personne ne les touche. Demandez à ces femmes ce qu’elles hurlent lorsqu’elles se répondent Ayayay !  

Ayayay ! ce cri qui résonne tout autant que les jiré manman. Ce cri qui sort des entrailles de nos terres, des entrailles de nos mères, des entrailles de nos enfances. 

Oublie-t-on tout d’un coup que parmi ces 25 000 femmes, pour la seule année écoulée, il y a 5 000 victimes de violences conjugales, 300 victimes de viol. Que parmi ces 25 000 femmes, 2 500 au moins ont été victimes d’inceste?  Et vous pouvez aisément les additionner. Que crient-elles à votre avis? 

Ayayay!, les femmes peuvent winer et courir en body dans le vidé parce qu’elles y sont en sécurité. Paradoxalement, les femmes sont moins exposées aux agressions sexuelles dans le vidé que dans la vie courante ou dans une boîte de nuit. Les prédateurs et les violeurs sont bien entendu présents et actifs au carnaval, et on déplore des agressions chaque jour, mais pas plus que les autres jours. Le problème c’est qu’ils sont tous là, les agresseurs. Les enquêteurs devraient en profiter pour les filmer au grand jour ? 

La bonne nouvelle, c’est que le rite d’inversion désactive la prédation sexuelle de tous les autres hommes dominants. Alors le vidé est une safe place surprenante au regard du nombre de personnes présentes. En fait, en tant que femme, winer en PoumPoum short à côté de ou avec nos compatriotes dans un vidé san manman san papa peut être un moment de liberté, de relâchement et d’émancipation inégalable. Le carnaval est un espace formidable et magique dont nous devrions être fiers et sur lequel nous pourrions concentrer nos recherches pour une pacification des relations femmes hommes, au lieu de paniquer parce qu’on y a aperçu un string. 

Que crient ces femmes quand elles crient Ayayay? Elle crient la joie d’être en vie. Elles crient la joie d’être dans la rue. Elles crient la joie d’être leur corps. Elles crient la joie de sentir leur corps. Elles crient la joie de sentir la vibration des tambours envahir ce corps, le faire renaître parfois, le faire exister aux yeux du monde, pas comme un monstre, un appât, une victime, une erreur, mais comme le coeur battant du pays, le centre des regards, le centre de sa propre existence. Elles crient. Ensemble. Elles ne sont pas des salopes couillonnes. Elles ne sont pas les responsables des violences, de la pédophilie, de la pornographie, des viols, des féminicides dont elles sont souvent l’objet. Un string n’a pas tué une femme le mercredi des cendres. 

Un homme en a tué une… 

C’est d’ailleurs pour cela que le résultat du mercredi n’était pas aussi fiable que celui des autres jours. On avait bien envie de compter aussi à l’entrée ouest, Almadies… Mais une femme est morte. Des journalistes ont, dès le matin, interpellé les féministes à ce propos. Son petit ami était en fuite. Elle avait 22 ans. Il fallait donc aussi, dans la déboulance de réveil du mardi gras, répondre au téléphone, faire des pancartes, agir. Parce qu’on ne pouvait pas retourner winer crier s’amuser et brûler un pauvre crocodile sans importance avant de penser à cette femme morte d’une balle dans la tête et à son petit ami en fuite. Tout cela, compter les strings, chercher à expliquer pourquoi les femmes veulent courir leur vidé dans une tenue plutôt qu’une autre, chercher à expliquer pourquoi une poignée de femmes ne peuvent pas marcher en string alors que les hommes le font depuis très longtemps… faire de la mercerie de rue au carnaval de la police des mœurs, jouer aux soldats de la révolution islamique en pleine bacchanale… 

Ça n’avait plus aucun sens. 

Je prendrai le temps de faire cet article scientifique, puisque j’ai commencé. 

Vous saurez, quand  me poserez la question, combien de walpa marchaient devant les pauvres yeux de vos enfants leurs fesses criminelles à l’air pendant que des femmes mouraient d’un coup de feu ou de petites flammes invisibles. Je ferai mon travail, et vous aurez, dans un an peut-être, parce que ça prend du temps, la science, la réponse à ces questions urgentes sur lesquelles repose semble-t-il l’équilibre de la société martiniquaise. 

Mais vous savez quoi? 

En vérité, la façon dont les femmes s’habillent au carnaval, en Martinique, n’a aucune importance.